Pisco, les raisins de la colère...
Voici venu le moment d'ouvrir une nouvelle édition spéciale consacrée à "La comida y las bebidas chilenas", entendez donc une édition consacrée à la bouffe et la boisson chilienne...
Le Pisco
Il aurait difficile de ne pas commencer cette édition spéciale avec la boisson nationale chilienne, j'ai nommé le Pisco. En plus d'être un produit hautement représentatif du pays, le Pisco est également un sujet, parmi d'autres, de discorde entre chiliens et péruviens...
Les origines
De ce que j'ai pu lire, il semblerait que le nom du Pisco vienne du Pérou, de la Vallée et de la ville de Pisco, premier port d'exportation du Pérou à cent kilomètres au sud de Lima, la capitale péruvienne. Et là on trouve deux origines mêlées. La première viendrait d'une race d'oiseaux très présente dans cette région et appelée en langage quechua pisqu. La deuxième viendrait du nom donné aux potiers de l'époque que l'on appelait les piskos. Ces derniers ayant été les premiers à concevoir les jarres que serviront à stocker l'eau de vie fabriquée là... Cette eau de vie prendra alors le nom de ces potiers, le Pisco.
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En 1988, les autorités péruviennes déclarèrent le Pisco comme faisant partie du patrimoine culturel du pays.
Au Chili, la région productrice de Pisco la plus connue est la Vallée d'Elqui, où l'on trouve d'ailleurs la ville de Pisco Elqui !
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Mais qu'est-ce que c'est que ce fameux Pisco ?
Le pisco est une eau de vie à base de raisin. Plusieurs cépages différents sont utilisés au Chili, comme au Pérou, pour donner naissance au Pisco. Cette boisson alcoolisée, variant entre 38 et 46 degrés, est le résultat de la distillation de la grappe de raisin entière (et pas seulement des grains...). Des ces raisins cultivés dans des régions chaudes, le pisco tire sa saveur sucrée. Parfois sont également ajoutés dans la composition du Pisco, des pommes et du maïs.
C'est une aujourd'hui la boisson nationale péruvienne et chilienne ! Les deux pays se font d'ailleurs la guéguerre quant à l'utilisation de l'appelation Pisco.
Les principales marques de Pisco chiliennes sont : Capel, Alto del Carmen, Ruta Norte et Pisco Control. Et comme tout bon alccol, on trouve du bon et du moins bon, du cher et du moins cher...
| Piscos chiliens | Piscos péruviens |
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El Valle del Elqui au Chili
Image backpackerschile.com
Le Pisco Sour (ou Pisco Punch)
Prononcer "Pisco Saweur"
Les origines
Outre la Mistela, mélange de pisco et de vin fabriqué principalement à Moquegua au Pérou (sorte de pommeau locale !), la boisson (ou cocktail) réalisée à base de Pisco la plus connue est le Pisco Sour.
Fabriqué à partir de Pisco, de citron vert, de sucre/sirop et de glace, ce cocktail serait apparu au Pérou en 1920 au Morris bar, dans le centre de Lima. Sur la base d'un cocktail existant, le Whisky Sour. Il aurait été créé par les bartenders péruviens Alfonso Bregoye, Alberto Cabrera et Graciano Mezarina. D'autre part, l'historien José Antonio Schiaffino soutient, dans L'Origine du Pisco Sour, que l'inventeur de la formule a été le californien Victor V. Morris, propriétaire du Morris Bar, qui a ouvert ses portes en 1915 et a cessé d'exister en 1933.
Bref... Le fait est que la recette s'est répandue dans la capitale péruvienne, jusqu'à être servie dans les plus grands hotels de la ville.
A quelques pas de là, le quasi centenaire Hôtel Maury, améliore définitivement la recette en modifiant les différents dosages. La recette, déclarée parfaite par tous ceux qui y goutent, devient une boisson incontournable. John Wayne, un fervent amateur de Pisco Sour et de l'Hotel Maury, y retrouve des personnalités comme Ava Gardner et Orson Welles. Une variante du Pisco Sour était d'ailleurs réalisé pour ces hôtes de marque. Une version corsée réalisée par le barman de l'hôtel avec une double mesure de pisco afin d'éviter de faire une Cathédrale de verres de Pisco Sours à la fin de la soirée... Ils appellèrent donc ce cocktail le Pisco Sour Cathédrale. On raconte qu'un soir, la belle Ava Gardner aurait même été vue après avoir avalé une douzaine de cathédrales, dansant sur le bar de l'étincelant Hotel Bolivar au joyeux scandale de tous les habitués !On peut encore aujourd'hui demander à un barman un Catedrale ! Normalement, il vous mettra 2 doses de Pisco et laissera quelques bouts de la peau du citron vert dans votre cocktail...
D'autres sources raconte que le Pisco Punch existait déjà à San Francisco aux Etats-Unis, d'où les marins commerçaient avec le port de Pisco et importaient le fameux Pisco et les citrons péruviens... Il aurait été inventé là-bas pendant la prohibition autour des années 1900.
L'Hotel Maury à Lima au Pérou
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Au Chili, c'est en 1934 que l'on trouve les premières traces du cocktail. L'écrivain chilien Joaquín Edwards Bello, dans La Chica del Crillón, mentionne une boisson appelée pisco sour, ou rotting-sour, composée de citrons et de pisco, que boivent des personnages de sa pièce.
Quant au Whisky Sour, il serait lui originaire du port chilien d’Iquique. Elliot Stubb, un majordome du voilier le Sunshine, décida de jeter l’ancre dans le port d’Iquique et ouvrit un bar près des quais d’embarquement. Un jour, il invente en expérimentant différents mélanges le fameux Whisky Sour (whisky, citrons du pérou et sucre).
Les écrits de Guillermo Toro-Lira accréditent la thèse de l'apparition du Pisco Punch en Californie
Au Pérou, une résolution ministérielle en date du 22 avril 2004 a institué que le premier samedi de Février de chaque année serait le jour du Pisco Sour. C'est dire si la boisson est prise au sérieux !
Le Chili a également emboité le pas puisqu'est aujourd'hui célébré chaque 15 mai El Día Nacional del Pisco. Ce jour là, ce sont 2 verres de Pisco pour 1 acheté dans la plupart des bars du pays, une sorte d'Happy Pisco Hour national !
Le 18 octobre 2007, l'Institut national de la culture du Pérou (INC) a déclaré le pisco sour Patrimoine Culturel de la nation, fondé sur la Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel de l'UNESCO.
La recette péruvienne (pour 1 personne)
- 10 cl de Pisco
- citron vert pressé
- 1 cl de sucre
- 1 blanc d'oeuf
- quelques gouttes d'Angostura (boisson de couleur brune à 44 degrés, fabriqué à Trinidad et Tobago dans les caraïbes, faite à base d'une formule secrète qui allie épices, extraits de plantes, herbes naturelles, d'écorces d'orange, substances amères et aromatiques).
Réalisez la recette Pisco sour au shaker. A l'intérieur, pressez votre citron et ajoutez-y le sucre en poudre (plus ou moins selon que vous êtes sensibles à l'acidité du citron) et le Pisco. Ajoutez le blanc d'oeuf et la glace pilée, frappez energiquement jusqu'à ne plus entendre le bruit des glaçons et versez. Quelques gouttes d'angostura sur la mousse et dégustez...
La mousse de ce cocktail est provoqué par le blanc d'oeuf dont on ne sent absolument pas le gout. La "french touch" est de remplacer l'angostura par une pincée de cannelle en poudre ou de la noix de muscade râpée.
La recette chilienne elle est beaucoup plus simple : pas d'Angostura ni de blanc d'oeuf !
En résumé...
Le Pisco Sour aurait été inventé, ou par quelqu'un resté inconnu à San Francisco, ou par un tenancier de bar californien ou par ses barmen péruviens, à partir d'une autre boisson inventée elle par un majordome anglais au Chili, à partir d'une boisson anglaise et de citrons péruviens...et est aujourd'hui servi avec un zeste d'une boisson fabriquée dans les caraïbes... Voilà une boisson nationale on ne peut plus internationale !!!
Parfois ça a du bon quand même la mondialisation des échanges !
A noter : A San Pedro de Atacama, tout bon bar qui se respecte fera son Pisco Sour maison au shaker, avec des petits citrons verts de Pica, oasis du nord du Chili spécialisé dans la culture de cet excellent citron... Et toute bonne excursion d'après midi se terminera par un apéro Pisco Sour devant le coucher de soleil !
Dans la zone internationale de l'aéroport de Santiago au Chili, vous pourrez, avant de monter dans l'avion du retour, prendre un dernier Pisco Sour au comptoir du bar au nom évocateur The Last Pisco Sour !